27 octobre 2025, le gouverneur de la Banque populaire de Chine, Pan Gongsheng, a de nouveau affirmé lors du Forum de la rue financière que la politique de prévention et de gestion des risques liés à la spéculation sur les transactions en monnaies virtuelles, en vigueur depuis 2017, demeure efficace et sera poursuivie. Il a également indiqué que la lutte contre les activités commerciales liées aux monnaies virtuelles se poursuivra afin de défendre l’ordre économique et financier. Cette déclaration a tracé une ligne rouge infranchissable pour la régulation des monnaies virtuelles dans notre pays.
Cependant, à l’autre extrémité de la réalité, un paradoxe frappant se joue dans la pratique judiciaire : de nombreux projets Web3 étrangers et bourses de monnaies virtuelles, qui ne sont pas reconnus par la loi ou même expressément interdits, cherchent et obtiennent à plusieurs reprises la protection du droit pénal national lorsqu’un litige interne survient, notamment lorsqu’ils accusent un employé de « détournement de fonction ». Certains organes chargés de l’enquête ont, par une interprétation étendue du concept de « unité » ou en reliant de force la compétence juridictionnelle, étendu la protection du droit pénal pour le crime de détournement de fonction à ces entités qui devraient être strictement régulées et combattues.
Cela soulève une question fondamentale à laquelle il faut répondre : l’utilisation des moyens les plus sévères du droit pénal national pour protéger un secteur dont l’activité interne est qualifiée par la politique financière nationale d’« activité financière illégale » ne viole-t-elle pas l’objectif de protection de l’intérêt juridique du droit pénal lui-même ? Cela ne crée-t-il pas un conflit profond avec la ligne directrice centrale visant à maintenir la sécurité financière ?
Pour répondre à cette question, il faut partir de la source — examiner la forme organisationnelle, le mode d’emploi et la nature patrimoniale des entreprises Web3, et analyser pourquoi elles présentent des différences naturelles avec le modèle traditionnel de crime de détournement de fonction, afin de démontrer que les entreprises Web3 ne devraient pas être incluses dans le champ de protection du crime de détournement de fonction selon notre droit.
Forme organisationnelle de l’industrie Web3
(1) Négation de la qualification du sujet
Sous la pression constante des politiques de régulation, la création et l’exploitation de projets Web3 et de bourses de monnaies virtuelles ont dès le départ une intention d’échapper à la régulation. Elles établissent généralement leur entité juridique dans des juridictions favorables aux politiques de cryptomonnaie, telles que les îles Caïmans, Singapour, Dubaï, etc. Dans l’article « Un projet Web3 étranger victime de détournement de fonction par un employé, peut-il déposer plainte en Chine ? — Approche par la reconnaissance de « l’unité victime » », l’avocat Shao mentionne que les entreprises Web3 adoptent souvent une architecture hybride offshore-onshore « multi-entités, rôles séparés », répartissant leurs risques et fonctions dans différentes juridictions. L’un des objectifs est d’éviter la régulation spécifique de certains territoires.
Selon le Code pénal chinois, la protection du crime de détournement de fonds vise principalement les relations de confiance et l’ordre patrimonial au sein d’organisations économiques légitimes. La légitimité de « l’unité » constitue la pierre angulaire de la protection juridique. Un projet Web3 ou une bourse enregistrée à l’étranger, dont l’activité principale en Chine est explicitement qualifiée d’« activité financière illégale », ne possède pas la base légitime pour bénéficier de cette protection spécifique du droit pénal.
Ils ne disposent pas de l’organisation requise par le droit chinois, comme la structure juridique, le lieu d’enregistrement ou l’obligation fiscale, et ne peuvent être considérés comme une « unité » au sens du droit pénal. Si l’organisme chargé de l’enquête tente de les interpréter de force comme « autres unités » au titre du crime de détournement de fonds, cela dépasse la limite de la théorie de la légalité des infractions et des peines, et revient à conférer à un acteur étranger non enregistré, non régulé par la Chine, dont le modèle d’affaires est qualifié par la politique de « activité financière illégale », un statut équivalent à celui d’une entreprise légitime locale. Une telle extension de l’interprétation revient à faire du droit pénal un « filet de sécurité » pour contourner la régulation, ce qui dévie gravement de l’objectif initial du crime de détournement de fonds.
(2) Absence de fondement de compétence juridictionnelle
Plus crucial encore, par leur architecture offshore, ces entreprises expriment clairement leur intention subjective de ne pas accepter la juridiction chinoise. Elles choisissent de s’établir et d’opérer dans des juridictions où leur modèle d’affaires est reconnu, ce qui implique qu’elles acceptent volontairement la régulation et la protection de ces territoires. Lorsqu’un problème de gouvernance interne survient, elles devraient en premier lieu rechercher une réparation selon la loi du lieu d’enregistrement.
Ainsi, lorsqu’un tel organisme dépose plainte auprès des autorités chinoises pour un litige interne, cela constitue une « utilisation sélective » de la régulation — évitant la régulation chinoise lors de leurs activités, mais cherchant la protection judiciaire chinoise en cas de conflit interne. Si la justice accepte de traiter cette plainte, cela non seulement tolère leur intention d’échapper à la régulation, mais remet aussi en cause la base de sa propre compétence juridictionnelle. La compétence pénale doit être établie sur la base de liens juridiques étroits prévus par la loi, et non devenir une ressource judiciaire accessible à des capitaux mondiaux en errance.
Par conséquent, la forme offshore de ces organisations Web3, conçue pour contourner la régulation, nie dès l’origine leur qualification en tant qu’« unité victime » selon notre droit pénal. Reconnaître leur statut de sujet entraînerait un effet de démonstration extrêmement négatif — en encourageant indirectement les acteurs du marché à recourir à des « arbitrages réglementaires », leur permettant de profiter des avantages du droit pénal sans respecter la conformité. Cela constituerait une injustice grave pour les entreprises légales et l’ordre financier national, et doit être rejeté.
Mode d’emploi spécifique du secteur Web3
Pour échapper à la régulation, les entreprises Web3 ne se contentent pas de créer des entités juridiques à l’étranger, elles mettent en place un mode d’emploi « différencié » entre l’intérieur et l’extérieur. D’un côté, pour maîtriser les coûts et exploiter la main-d’œuvre locale, elles tendent à employer des personnels en Chine continentale ; de l’autre, pour délimiter les risques juridiques, elles délèguent à des sociétés tierces nationales la signature de contrats de travail formels avec leurs employés, puis signent avec ces mêmes employés des accords de conseil ou de service au nom de l’entité étrangère. Cette complexité de la relation triangulaire, conçue pour contourner la régulation, affaiblit également la base d’application du crime.
(1) Sur le plan de « l’identité du sujet », ce mode brouille la définition juridique du « personnel de l’unité »
Le crime de détournement de fonds suppose que l’auteur soit « un employé de l’unité ». Cependant, dans ce mode, l’employé a pour employeur légal une société tierce en Chine, qui paie ses salaires et cotisations sociales. Du point de vue du droit du travail, il n’a pas de relation directe avec le projet Web3 étranger. Il fournit ses services en vertu d’un « accord de conseil » signé avec l’entité étrangère. Cela signifie qu’il se rapproche juridiquement d’un prestataire indépendant ou d’un fournisseur de services, plutôt que d’un « employé de l’unité » soumis à la gestion interne. Si l’accusation ne peut pas clairement démontrer qu’il appartient à la catégorie des « personnels d’une société, entreprise ou autre unité » prévue à l’article 271 du Code pénal, poursuivre pour détournement de fonds devient infondé.
(2) Sur le plan de la « propriété patrimoniale », cette organisation met en évidence que les biens en cause ne sont pas typiquement « biens de l’unité »
La rémunération de l’employé se compose essentiellement de deux parties : le salaire en monnaie légale versé par la société tierce en Chine, et les « honoraires de conseil » payés en monnaies virtuelles ou autres formes par le projet Web3 à l’étranger. La nature patrimoniale de cette dernière est déjà contestée en droit, en raison de son origine étrangère et de sa nature virtuelle. Plus important encore, cette modalité de paiement reflète la nature transfrontalière et floue des actifs du projet Web3. Lorsque l’origine, la propriété et la nature de ces actifs échappent à la régulation et à la définition claire en droit national, il est juridiquement excessif de les assimiler à des « biens de l’unité » protégés par le droit pénal.
(3) Sur le plan de la « commodité de l’emploi », la complexité des accords rend difficile la reconnaissance d’un « acte d’emploi »
Le crime de détournement suppose l’utilisation de « facilités liées à la fonction ». Cependant, lorsque l’employé agit à la fois pour un employeur national (société tierce) et pour un client étranger (projet Web3), il est difficile de déterminer quel acte est autorisé par quel accord. Son opération sur des actifs virtuels, s’agit-il de l’exécution de ses obligations dans le cadre du contrat de travail national ou de l’accord de conseil avec l’entité étrangère ? La confusion et la superposition de responsabilités rendent difficile pour l’accusation de prouver de manière claire et exclusive que l’« avantage » ou l’« acte » provient de la « facilitation » liée à la Web3 étrangère, considérée comme « unité victime ».
De plus, le crime de détournement cible la « trahison de la relation de confiance » dans la fonction. Or, dans une organisation où tous participent et dont l’activité évolue dans une zone grise ou noire du droit, cette « relation de confiance » est difficile à établir. Lorsque la base même de l’existence de l’organisation contredit la régulation financière nationale, ses « fonctions » internes relèvent davantage d’une division illégale du travail que d’un mandat légitime.
Par conséquent, les autorités doivent également reconnaître que ce mode d’emploi, délibérément conçu pour contourner la régulation spécifique, soulève principalement des questions de gestion contractuelle, de répartition des bénéfices et de gestion des pouvoirs, qui relèvent davantage du civil ou du commercial. Engager précipitamment une procédure pénale dans un contexte où la structure organisationnelle, la relation d’emploi et la propriété patrimoniale sont floues risque non seulement de mal interpréter la nature de l’acte, mais aussi de dévier du rôle « ultime » du droit pénal, entraînant des coûts sociaux inutiles.
Analyse de la nature patrimoniale des entreprises Web3
Après avoir démontré que ces entités ne peuvent pas être qualifiées d’« unités victimes », même en admettant leur statut, la question de la protection de leur « patrimoine » selon le droit pénal reste très controversée. La protection du « bien » dans le crime de détournement suppose que ce bien soit légitime et reconnu par la loi. Or, la source et la nature des actifs principaux des projets Web3 et des bourses sont fortement suspectes.
(1) Illicéité de la source patrimoniale
Selon la « Notification 924 » et d’autres politiques émises par la Banque populaire de Chine et plusieurs départements, les activités liées aux monnaies virtuelles sont explicitement qualifiées d’« activités financières illégales ». Cela signifie que les fonds levés par ICO ou par des échanges de monnaies virtuelles, ainsi que les revenus issus de ces activités, sont considérés comme des gains illicites en droit chinois.
Le droit pénal, en tant que dernier rempart de la justice sociale, ne doit pas servir à maintenir l’ordre ou la répartition des gains issus d’activités économiques illicites. Utiliser la force du droit pénal pour protéger un « patrimoine » issu d’une activité qualifiée d’illégale revient à tenter de faire reconnaître comme « légitime » un gain d’un casino entre le croupier et le joueur, ce qui est absurde en théorie et gravement nuisible à la crédibilité du droit pénal en pratique.
(2) Ambiguïté et fausseté de la nature patrimoniale
De plus, si la « victime » accuse un employé d’avoir détourné des « biens » qui sont en réalité des tokens qu’elle a elle-même émis sans valeur réelle, la qualification patrimoniale de ces biens devient très contestable.
La nature juridique des monnaies virtuelles n’est pas encore unifiée en Chine, avec des courants de pensée divergents comme la « théorie des données » ou la « théorie patrimoniale ». Les tokens créés par les projets pour financer ou motiver les participants, sans ancrage tangible, ressemblent davantage à des certificats de données ou de services. Leur valeur dépend principalement de l’émotion du marché et de la spéculation, ce qui en fait une « attente de bénéfices futurs » virtuelle et incertaine.
Le « bien » dans le crime de détournement doit être un actif ayant une valeur économique claire et protégée par la loi, comme un bien mobilier, immobilier ou un droit patrimonial. Imposer à un token auto-créé, dont la valeur fluctue et dont le statut juridique est flou, la qualification de « bien de l’unité » protégé par le droit pénal, dépasse largement la portée du vocabulaire pénal et viole le principe de légalité des infractions.
Par conséquent, du point de vue de la théorie du crime de détournement, les « biens » revendiqués par les entreprises Web3 ou les bourses ne méritent pas la protection du droit pénal.
Conclusion
Appliquer le crime de détournement de fonds du droit pénal chinois aux employés locaux du Web3, tout en protégeant les projets Web3 étrangers et les bourses de monnaies virtuelles, soulève non seulement des controverses sur la qualification du sujet et la nature patrimoniale, mais entre aussi en conflit évident avec la politique macroéconomique de régulation financière.
Depuis la « Notification 924 » jusqu’aux déclarations récentes des autorités, la Chine a clairement qualifié les activités liées aux monnaies virtuelles d’« activités financières illégales ». Dans ce contexte, si les organes judiciaires utilisent le crime de détournement pour protéger ces entreprises Web3, cela entraînera une fracture grave dans l’ordre juridique — la régulation administrative exige « la suppression », tandis que la justice pénale leur offre une « garantie » inversée.
Une telle division affaiblira non seulement la dissuasion de la régulation, mais créera aussi de fausses attentes sur le marché, encouragera indirectement la régulation arbitrale, et mobilisera inutilement des ressources judiciaires pour résoudre des conflits internes à des activités illicites, au lieu de lutter contre les crimes réellement nuisibles à l’ordre social et à la propriété des citoyens.
Nous appelons donc sincèrement les enquêteurs à faire preuve de prudence, en adoptant une perspective macroéconomique plus élevée, en tenant compte des politiques globales, et en s’appuyant sur la législation du droit pénal dans sa conception originelle pour juger avec prudence.
Le droit pénal, en tant que dernier recours, ne doit pas devenir un outil pour maintenir l’ordre interne d’activités financières illégales. Respecter le principe de « modération » du droit pénal, assurer la coordination entre la justice pénale et la régulation financière, est essentiel pour préserver l’unité de l’ordre juridique et défendre la sécurité financière nationale. Les litiges internes liés à la participation à des activités financières illégales doivent être résolus par voie civile ou administrative, et non par une procédure pénale précipitée. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra équilibrer l’innovation technologique et la stabilité financière dans le respect de l’état de droit.
Déclaration spéciale : cet article est une œuvre originale de l’avocat Shao Shiwe, et reflète uniquement l’opinion personnelle de son auteur. Il ne constitue pas un avis juridique ou une consultation juridique spécifique.
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Défense contre l'infraction d'abus de confiance : pourquoi les professionnels du Web3 ne devraient pas devenir des cibles de crime ?
27 octobre 2025, le gouverneur de la Banque populaire de Chine, Pan Gongsheng, a de nouveau affirmé lors du Forum de la rue financière que la politique de prévention et de gestion des risques liés à la spéculation sur les transactions en monnaies virtuelles, en vigueur depuis 2017, demeure efficace et sera poursuivie. Il a également indiqué que la lutte contre les activités commerciales liées aux monnaies virtuelles se poursuivra afin de défendre l’ordre économique et financier. Cette déclaration a tracé une ligne rouge infranchissable pour la régulation des monnaies virtuelles dans notre pays.
Cependant, à l’autre extrémité de la réalité, un paradoxe frappant se joue dans la pratique judiciaire : de nombreux projets Web3 étrangers et bourses de monnaies virtuelles, qui ne sont pas reconnus par la loi ou même expressément interdits, cherchent et obtiennent à plusieurs reprises la protection du droit pénal national lorsqu’un litige interne survient, notamment lorsqu’ils accusent un employé de « détournement de fonction ». Certains organes chargés de l’enquête ont, par une interprétation étendue du concept de « unité » ou en reliant de force la compétence juridictionnelle, étendu la protection du droit pénal pour le crime de détournement de fonction à ces entités qui devraient être strictement régulées et combattues.
Cela soulève une question fondamentale à laquelle il faut répondre : l’utilisation des moyens les plus sévères du droit pénal national pour protéger un secteur dont l’activité interne est qualifiée par la politique financière nationale d’« activité financière illégale » ne viole-t-elle pas l’objectif de protection de l’intérêt juridique du droit pénal lui-même ? Cela ne crée-t-il pas un conflit profond avec la ligne directrice centrale visant à maintenir la sécurité financière ?
Pour répondre à cette question, il faut partir de la source — examiner la forme organisationnelle, le mode d’emploi et la nature patrimoniale des entreprises Web3, et analyser pourquoi elles présentent des différences naturelles avec le modèle traditionnel de crime de détournement de fonction, afin de démontrer que les entreprises Web3 ne devraient pas être incluses dans le champ de protection du crime de détournement de fonction selon notre droit.
Forme organisationnelle de l’industrie Web3
(1) Négation de la qualification du sujet
Sous la pression constante des politiques de régulation, la création et l’exploitation de projets Web3 et de bourses de monnaies virtuelles ont dès le départ une intention d’échapper à la régulation. Elles établissent généralement leur entité juridique dans des juridictions favorables aux politiques de cryptomonnaie, telles que les îles Caïmans, Singapour, Dubaï, etc. Dans l’article « Un projet Web3 étranger victime de détournement de fonction par un employé, peut-il déposer plainte en Chine ? — Approche par la reconnaissance de « l’unité victime » », l’avocat Shao mentionne que les entreprises Web3 adoptent souvent une architecture hybride offshore-onshore « multi-entités, rôles séparés », répartissant leurs risques et fonctions dans différentes juridictions. L’un des objectifs est d’éviter la régulation spécifique de certains territoires.
Selon le Code pénal chinois, la protection du crime de détournement de fonds vise principalement les relations de confiance et l’ordre patrimonial au sein d’organisations économiques légitimes. La légitimité de « l’unité » constitue la pierre angulaire de la protection juridique. Un projet Web3 ou une bourse enregistrée à l’étranger, dont l’activité principale en Chine est explicitement qualifiée d’« activité financière illégale », ne possède pas la base légitime pour bénéficier de cette protection spécifique du droit pénal.
Ils ne disposent pas de l’organisation requise par le droit chinois, comme la structure juridique, le lieu d’enregistrement ou l’obligation fiscale, et ne peuvent être considérés comme une « unité » au sens du droit pénal. Si l’organisme chargé de l’enquête tente de les interpréter de force comme « autres unités » au titre du crime de détournement de fonds, cela dépasse la limite de la théorie de la légalité des infractions et des peines, et revient à conférer à un acteur étranger non enregistré, non régulé par la Chine, dont le modèle d’affaires est qualifié par la politique de « activité financière illégale », un statut équivalent à celui d’une entreprise légitime locale. Une telle extension de l’interprétation revient à faire du droit pénal un « filet de sécurité » pour contourner la régulation, ce qui dévie gravement de l’objectif initial du crime de détournement de fonds.
(2) Absence de fondement de compétence juridictionnelle
Plus crucial encore, par leur architecture offshore, ces entreprises expriment clairement leur intention subjective de ne pas accepter la juridiction chinoise. Elles choisissent de s’établir et d’opérer dans des juridictions où leur modèle d’affaires est reconnu, ce qui implique qu’elles acceptent volontairement la régulation et la protection de ces territoires. Lorsqu’un problème de gouvernance interne survient, elles devraient en premier lieu rechercher une réparation selon la loi du lieu d’enregistrement.
Ainsi, lorsqu’un tel organisme dépose plainte auprès des autorités chinoises pour un litige interne, cela constitue une « utilisation sélective » de la régulation — évitant la régulation chinoise lors de leurs activités, mais cherchant la protection judiciaire chinoise en cas de conflit interne. Si la justice accepte de traiter cette plainte, cela non seulement tolère leur intention d’échapper à la régulation, mais remet aussi en cause la base de sa propre compétence juridictionnelle. La compétence pénale doit être établie sur la base de liens juridiques étroits prévus par la loi, et non devenir une ressource judiciaire accessible à des capitaux mondiaux en errance.
Par conséquent, la forme offshore de ces organisations Web3, conçue pour contourner la régulation, nie dès l’origine leur qualification en tant qu’« unité victime » selon notre droit pénal. Reconnaître leur statut de sujet entraînerait un effet de démonstration extrêmement négatif — en encourageant indirectement les acteurs du marché à recourir à des « arbitrages réglementaires », leur permettant de profiter des avantages du droit pénal sans respecter la conformité. Cela constituerait une injustice grave pour les entreprises légales et l’ordre financier national, et doit être rejeté.
Mode d’emploi spécifique du secteur Web3
Pour échapper à la régulation, les entreprises Web3 ne se contentent pas de créer des entités juridiques à l’étranger, elles mettent en place un mode d’emploi « différencié » entre l’intérieur et l’extérieur. D’un côté, pour maîtriser les coûts et exploiter la main-d’œuvre locale, elles tendent à employer des personnels en Chine continentale ; de l’autre, pour délimiter les risques juridiques, elles délèguent à des sociétés tierces nationales la signature de contrats de travail formels avec leurs employés, puis signent avec ces mêmes employés des accords de conseil ou de service au nom de l’entité étrangère. Cette complexité de la relation triangulaire, conçue pour contourner la régulation, affaiblit également la base d’application du crime.
(1) Sur le plan de « l’identité du sujet », ce mode brouille la définition juridique du « personnel de l’unité »
Le crime de détournement de fonds suppose que l’auteur soit « un employé de l’unité ». Cependant, dans ce mode, l’employé a pour employeur légal une société tierce en Chine, qui paie ses salaires et cotisations sociales. Du point de vue du droit du travail, il n’a pas de relation directe avec le projet Web3 étranger. Il fournit ses services en vertu d’un « accord de conseil » signé avec l’entité étrangère. Cela signifie qu’il se rapproche juridiquement d’un prestataire indépendant ou d’un fournisseur de services, plutôt que d’un « employé de l’unité » soumis à la gestion interne. Si l’accusation ne peut pas clairement démontrer qu’il appartient à la catégorie des « personnels d’une société, entreprise ou autre unité » prévue à l’article 271 du Code pénal, poursuivre pour détournement de fonds devient infondé.
(2) Sur le plan de la « propriété patrimoniale », cette organisation met en évidence que les biens en cause ne sont pas typiquement « biens de l’unité »
La rémunération de l’employé se compose essentiellement de deux parties : le salaire en monnaie légale versé par la société tierce en Chine, et les « honoraires de conseil » payés en monnaies virtuelles ou autres formes par le projet Web3 à l’étranger. La nature patrimoniale de cette dernière est déjà contestée en droit, en raison de son origine étrangère et de sa nature virtuelle. Plus important encore, cette modalité de paiement reflète la nature transfrontalière et floue des actifs du projet Web3. Lorsque l’origine, la propriété et la nature de ces actifs échappent à la régulation et à la définition claire en droit national, il est juridiquement excessif de les assimiler à des « biens de l’unité » protégés par le droit pénal.
(3) Sur le plan de la « commodité de l’emploi », la complexité des accords rend difficile la reconnaissance d’un « acte d’emploi »
Le crime de détournement suppose l’utilisation de « facilités liées à la fonction ». Cependant, lorsque l’employé agit à la fois pour un employeur national (société tierce) et pour un client étranger (projet Web3), il est difficile de déterminer quel acte est autorisé par quel accord. Son opération sur des actifs virtuels, s’agit-il de l’exécution de ses obligations dans le cadre du contrat de travail national ou de l’accord de conseil avec l’entité étrangère ? La confusion et la superposition de responsabilités rendent difficile pour l’accusation de prouver de manière claire et exclusive que l’« avantage » ou l’« acte » provient de la « facilitation » liée à la Web3 étrangère, considérée comme « unité victime ».
De plus, le crime de détournement cible la « trahison de la relation de confiance » dans la fonction. Or, dans une organisation où tous participent et dont l’activité évolue dans une zone grise ou noire du droit, cette « relation de confiance » est difficile à établir. Lorsque la base même de l’existence de l’organisation contredit la régulation financière nationale, ses « fonctions » internes relèvent davantage d’une division illégale du travail que d’un mandat légitime.
Par conséquent, les autorités doivent également reconnaître que ce mode d’emploi, délibérément conçu pour contourner la régulation spécifique, soulève principalement des questions de gestion contractuelle, de répartition des bénéfices et de gestion des pouvoirs, qui relèvent davantage du civil ou du commercial. Engager précipitamment une procédure pénale dans un contexte où la structure organisationnelle, la relation d’emploi et la propriété patrimoniale sont floues risque non seulement de mal interpréter la nature de l’acte, mais aussi de dévier du rôle « ultime » du droit pénal, entraînant des coûts sociaux inutiles.
Analyse de la nature patrimoniale des entreprises Web3
Après avoir démontré que ces entités ne peuvent pas être qualifiées d’« unités victimes », même en admettant leur statut, la question de la protection de leur « patrimoine » selon le droit pénal reste très controversée. La protection du « bien » dans le crime de détournement suppose que ce bien soit légitime et reconnu par la loi. Or, la source et la nature des actifs principaux des projets Web3 et des bourses sont fortement suspectes.
(1) Illicéité de la source patrimoniale
Selon la « Notification 924 » et d’autres politiques émises par la Banque populaire de Chine et plusieurs départements, les activités liées aux monnaies virtuelles sont explicitement qualifiées d’« activités financières illégales ». Cela signifie que les fonds levés par ICO ou par des échanges de monnaies virtuelles, ainsi que les revenus issus de ces activités, sont considérés comme des gains illicites en droit chinois.
Le droit pénal, en tant que dernier rempart de la justice sociale, ne doit pas servir à maintenir l’ordre ou la répartition des gains issus d’activités économiques illicites. Utiliser la force du droit pénal pour protéger un « patrimoine » issu d’une activité qualifiée d’illégale revient à tenter de faire reconnaître comme « légitime » un gain d’un casino entre le croupier et le joueur, ce qui est absurde en théorie et gravement nuisible à la crédibilité du droit pénal en pratique.
(2) Ambiguïté et fausseté de la nature patrimoniale
De plus, si la « victime » accuse un employé d’avoir détourné des « biens » qui sont en réalité des tokens qu’elle a elle-même émis sans valeur réelle, la qualification patrimoniale de ces biens devient très contestable.
La nature juridique des monnaies virtuelles n’est pas encore unifiée en Chine, avec des courants de pensée divergents comme la « théorie des données » ou la « théorie patrimoniale ». Les tokens créés par les projets pour financer ou motiver les participants, sans ancrage tangible, ressemblent davantage à des certificats de données ou de services. Leur valeur dépend principalement de l’émotion du marché et de la spéculation, ce qui en fait une « attente de bénéfices futurs » virtuelle et incertaine.
Le « bien » dans le crime de détournement doit être un actif ayant une valeur économique claire et protégée par la loi, comme un bien mobilier, immobilier ou un droit patrimonial. Imposer à un token auto-créé, dont la valeur fluctue et dont le statut juridique est flou, la qualification de « bien de l’unité » protégé par le droit pénal, dépasse largement la portée du vocabulaire pénal et viole le principe de légalité des infractions.
Par conséquent, du point de vue de la théorie du crime de détournement, les « biens » revendiqués par les entreprises Web3 ou les bourses ne méritent pas la protection du droit pénal.
Conclusion
Appliquer le crime de détournement de fonds du droit pénal chinois aux employés locaux du Web3, tout en protégeant les projets Web3 étrangers et les bourses de monnaies virtuelles, soulève non seulement des controverses sur la qualification du sujet et la nature patrimoniale, mais entre aussi en conflit évident avec la politique macroéconomique de régulation financière.
Depuis la « Notification 924 » jusqu’aux déclarations récentes des autorités, la Chine a clairement qualifié les activités liées aux monnaies virtuelles d’« activités financières illégales ». Dans ce contexte, si les organes judiciaires utilisent le crime de détournement pour protéger ces entreprises Web3, cela entraînera une fracture grave dans l’ordre juridique — la régulation administrative exige « la suppression », tandis que la justice pénale leur offre une « garantie » inversée.
Une telle division affaiblira non seulement la dissuasion de la régulation, mais créera aussi de fausses attentes sur le marché, encouragera indirectement la régulation arbitrale, et mobilisera inutilement des ressources judiciaires pour résoudre des conflits internes à des activités illicites, au lieu de lutter contre les crimes réellement nuisibles à l’ordre social et à la propriété des citoyens.
Nous appelons donc sincèrement les enquêteurs à faire preuve de prudence, en adoptant une perspective macroéconomique plus élevée, en tenant compte des politiques globales, et en s’appuyant sur la législation du droit pénal dans sa conception originelle pour juger avec prudence.
Le droit pénal, en tant que dernier recours, ne doit pas devenir un outil pour maintenir l’ordre interne d’activités financières illégales. Respecter le principe de « modération » du droit pénal, assurer la coordination entre la justice pénale et la régulation financière, est essentiel pour préserver l’unité de l’ordre juridique et défendre la sécurité financière nationale. Les litiges internes liés à la participation à des activités financières illégales doivent être résolus par voie civile ou administrative, et non par une procédure pénale précipitée. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra équilibrer l’innovation technologique et la stabilité financière dans le respect de l’état de droit.
Déclaration spéciale : cet article est une œuvre originale de l’avocat Shao Shiwe, et reflète uniquement l’opinion personnelle de son auteur. Il ne constitue pas un avis juridique ou une consultation juridique spécifique.